Le Docteur Guy Jourdan, un Grand Résistant

Plaque commémorative dévoilée le 26 aout 2023 en présence de la famille Jourdan au Manoir de la Bigotière à Pleslin-Trigavou

La personnalité du Docteur Guy Jourdan, son humanité et son engagement patriotique jusqu’à son sacrifice ultime pour la liberté ont fait de lui un personnage marquant pour la Bigotière, la commune de Pleslin, la commune de Sainte Ménéhould, la région de l’Argonne et toute la Meuse.

Guy, Jean-Baptiste, Galdino JOURDAN est né le 26 mars 1915 à Saint-Lô dans la Manche, son père Émile Jourdan étant mobilisé sur le front à Caen lors de la guerre 14-18 en tant que vétérinaire major.

Guy grandit dans une famille bourgeoise et cultivée ; il y reçoit une éducation profondément chrétienne et patriote. Il fera ses études à l'institution Sainte-Marie de Caen où il est un très bon élève.

Sa maman, Marie-Thérèse Dutertre Dartige d’Arfeuille étant née à Lancieux, le couple Jourdan reprend la maison familiale de la Bigotière dans les années 20.

Au vu des livres que nous avons trouvé dans cette maison, les lectures de la famille Jourdan étaient les valeurs sûres de l’époque, entre autres Chateaubriand.

Jules JANIN, écrivain et critique dramatique français du 19ème siècle, contemporain de Chateaubriand a écrit 2 ouvrages passionnants sur la Bretagne et la Normandie où il rend un hommage appuyé et probant à l’écrivain malouin. Ces livres ont certainement éduqué le jeune Guy Jourdan.

Guy fera ses études à la faculté de médecine de Paris sous la bienveillance de son oncle le Docteur Alfred Jourdan. Une fois sa thèse soutenue en 1939, Il exercera à la maison maternelle Saint-Maurice dans le Val-de-Marne où il était destiné à faire une belle carrière. Il avait son appartement à Paris au 5, rue Julien Lacroix dans le 20e arrondissement.

Au début de la guerre, le Docteur Guy Jourdan fut affecté sur sa demande au 25ème régiment de tirailleurs algériens. Il sera fait prisonnier en mai 1940 avec son régiment dans un camp de travail au sud de Stuttgart. Il est rapatrié comme sanitaire en juin 1941.

Dès son retour à Paris, il reprend la lutte contre l'envahisseur et met à la disposition du haut commandement toutes les ressources dont il dispose : sa fortune, sa vive intelligence et son audacieuse ténacité.

Son nom de Résistant « Capitaine Janin » n’est peut-être pas étranger à ses jeunes lectures. Tout comme son second nom de Résistant « Jouve » est sans doute le nom de son éditeur de thèse de médecine.

A partir d'octobre 1943, il est dans la Drôme et dans la Haute-Savoie où pendant de longs mois il assure les liaisons avec la Suisse sur les pistes couvertes de neige et extrêmement dangereuses.

Rappelé à Paris, il est chargé d'organiser la lutte dans la Marne d'abord, puis dans la Meuse. Il s'occupe de recueillir les armes parachutées, et malgré le voisinage de la Wehrmacht, il réussit par son savoir-faire et son mépris du danger, à sauver la vie à nombre d'officiers alliés.

Arrêté par la Gestapo, on le croit mort ou déporté. Pas du tout ! Il a réussi à s'évader 3 fois et retourne à Paris réclamer d'autres missions.

En mai 1944, le Colonel Gilbert Grandval, (délégué militaire de la Région C qui englobe tous les départements de l’est de la France) nomme le Commandant Jean Bertrand chef des F.F.I. de la Meuse et le Docteur Guy Jourdan son adjoint.

Dans la nuit du 20 au 21 aout 1944, 2 Jedburghs (commandos britanniques) sont parachutés sur le terrain de Montgargny. Ils viennent renforcer la Résistance…

Simultanément, 33 containers et 16 paquets d’armes sont parachutés ;

Mais cette activité n’est pas passée inaperçue aux yeux des allemands.

C’est en allant récupérer ces containeurs dans un champ situé en bord de route entre les petits villages de Rarécourt et Froidos, que le Commandant Jean Bertrand, le Docteur Guy Jourdan et René Magny sont surpris par les allemands qui arrivent par la route…

Ils tentent de s’enfuir dans le bois, mais en passant les barbelés, Guy Jourdan sera blessé à l’épaule par l’ennemi.

Tous les trois seront arrêtés :

  • René Magny sera exécuté le jour même de son arrestation près d'un dépôt d'armes à Froidos.
  • Le commandant Jean Bertrand alias « Agnelet » sera déporté en Allemagne ; plus personne n'aura de ses nouvelles.

Tombé aux mains de l'ennemi, le Capitaine Guy Jourdan est enfermé au collège Chanzy de Sainte-Menehould avec une trentaine d’autres résistants. Là, il passe à la torture, mais telle est sa force que ses bourreaux n'obtiennent de lui aucun aveu.

Le 27 août, après avoir été martyrisé, les 2 membres brisés, il est exécuté d’une balle de révolver dans la nuque à l'orée d'un bois au lieu-dit « la Présidence » à Sainte-Menehould. Il avait 29 ans !

Sainte-Menehould est libérée le 30 août !...

Le 13 septembre 1944, après le repli des Allemands, Monsieur Vallet, cultivateur à la ferme de la Camuterie à Sainte-Menehould, se rend dans son champ à 500 m de la ferme en compagnie de son fils Guy. Ils trouveront le corps de Guy Jourdan sommairement enterré. Guy Vallet avait 15 ans à l’époque ; il en a 94 ans aujourd’hui et se souvient très bien comment cette triste découverte aura bouleversé sa vie d’adolescent. Le corps de Guy sera reconnu par Jean Martin et Michel Rufin des maquis d’Argonne, ainsi que par Monsieur et Madame Revaux.

Son père Émile Jourdan fera le déplacement pour aller reconnaitre son fils.

Sa dépouille sera ramenée dans la sépulture familiale à Dinan le 4 septembre 1948.

En reconnaissance de son sacrifice, Guy Jourdan obtient la mention « Mort pour la France » le 7 décembre 1945.

Sur les recommandations du Colonel Gilbert Grandval, Le Docteur Guy Jourdan sera décoré de la Légion d’honneur à titre posthume, de la Croix de Guerre avec Palmes, de la médaille des évadés et de la médaille de la Résistance.